GOOD NIGHT, AND GOOD LUCK
David Strathairn
Sans être manichéen, les journalistes s’attachent ici aux faits, cherchant les contradictions de McCarthy, les failles de sa machine à broyer les consciences. La paranoïa collective atteignant tous les pouvoirs de l’armée aux médias, finissent par pousser les grands manipulateurs à la faute. "Le quatrième pouvoir" semble être né à ce moment là. Le journalisme d’investigations obtient ici ses lettres de noblesses. Le film parle de l’importance de l’éthique, ce qui est universel, il dénonce certaines connivences avec les pouvoirs, c’est d’autant plus important que nous avons une présentatrice TV du service public, mariée à un ministre en exercice, sans que ça ne semble absolument plus poser de problèmes à personne. Le film déplore aussi la censure économique des "sponsors", l’équipe de journalistes dirigée par Fred Friendly – Clooney qui ne s’est pas donné le beau rôle -, doit réfléchir à la perte d’une manne publicitaire avant d’énoncer une vérité dérangeante. David Strathairn – prix d’interprétation largement mérité au festival de Venise - méconnaissable quant on l’a vu chez John Sayles – il était formidable dans le méconnu « Limbo » - porte le film sur les épaules, ses interventions de moralistes et polémiques face au public sont des grands moments de cinéma, les autres comédiens étant plus en retrait – notamment les excellents Ray Wise, Robert Downey jr et Patricia Clarkson, Jeff Daniels en directeur des nouvelles, un peu sacrifiés en journalistes inquiets, Franck Langella en cynique patron de presse, Ray Wise -. Strathairn compose admirablement son personnage, cachant sa nervosité derrière une sempiternelle cigarette, et montre une conviction étonnante. Le regard attachant sur ces pionniers des médias face au cynisme ambiant, est la grande réussite de ce film exigeant même s’il pâtit d'un peu de trop de distances.